JulienFalgas

joined 2 years ago
[–] JulienFalgas@lemmy.world 1 points 2 weeks ago

L’OCDE publie aussi un indicateur bien plus pertinent : le nombre d’heures travaillées par personne en emploi (temps partiel ou temps plein).

Pas si pertinent que ça. Les disparités observées avec cet indicateur semblent fortement liées à la situation du marché du travail dans chaque Etat : un travailleur Grec assure certes 400 heures de plus par an qu'un Français, et un Allemand 150h de moins. Mais moins de 64% des Grecs en âge de travailler ont un emploi, contre 69% en France et 77% en Allemagne.

Peut-être faudrait-il prendre en compte le travail invisible lié aux tâches ménagères et aux enfants... Si les deux membre d'un couple exercent un emploi sur une base égalitaire, on ne peut pas attendre qu'iels assurent autant d'heures en emploi que les membres d'un couple dont l'une est au foyer et assure toute la logistique permettant à l'autre de se consacrer exclusivement à son activité professionnelle.

[–] JulienFalgas@lemmy.world 2 points 1 month ago (1 children)

Les exemples sont édifiants, mais je déplore comme toi le ton sensationnaliste du propos.

L'enquête ne dit pas assez que la recherche publique est muselée par le financement par projets, l'exigence de cofinancements privés, à produire de la "PI" transférable. Les chercheurs désireux d'expérimenter sont contraints de se conformer aux appels orientés pour nourrir la "transition digitale" ou la "révolution de l'IA".

Que certains adhèrent à cette idéologie n'a rien de surprenant. Les jeter en pâture dans des enquêtes-choc n'y changera rien et ne fait que saper la crédibilité de la recherche publique.

Nous avons besoin d'ingénieurs (dev, UX/UI, data) dans les labos de SHS, de science ouverte, de transfert vers l'ESS. Bref, d'une politique de recherche qui surmonte l'impensé numérique.

Au lieu de quoi, l'enquête diabolise "les écrans" et "les réseaux sociaux", comme si leur forme actuelle et dominante allait de soi. Elle ne dénonce pas le dévoiement des potentiels du numérique par des firmes accrocs à leur modèle économique toxique. C'est pourtant à ce modèle qu'il nous faut nous attaquer. Nous ne sommes que les fumeurs passifs de la dépendance des BigTech à la publicité ciblée et à nos données personnelles.

Un autre numérique est possible. Le problème, c'est que nos politiques et nos journalistes sont incapables de l'imaginer. Ils s'ingénient à prétendre défendre les jeunes, alors qu'eux-même sont addicts à la pire des plateformes antisociale : X.

[–] JulienFalgas@lemmy.world 2 points 3 months ago

David Colon constate que la stratégie d'autorégulation européenne échoue à nous protéger des ingérences rendues possibles par les plateformes des Big Tech. Selon lui :

« il faut tenter de rétablir un marché de l’information numérique libre et non faussé, en créant, par exemple, un média social européen à but non lucratif qui ne repose pas sur les dispositifs permettant d’exposer nos esprits à la guerre cognitive. »

Face aux grandes plateformes qui instaurent les conditions sans précédent pour exploiter nos biais cognitifs, nous n'avons pas besoin d'un réseau social calqué sur les dispositifs développés par les big tech pour capter l'attention.

Les grandes plateformes n'ont jamais trouvé d'autre modèle de rentabilité que celui de l'attention. Pour leur échapper, nous devons changer de paradigme et cesser d'attendre la startup providentielle ou le "Elon Musk européen".

Et si la réponse venait d'initiatives coopératives, fondées sur l'alliance entre la société civile et la recherche publique ? Et si on créait un média social taillé "by design" dans l'intérêt collectif ?

[–] JulienFalgas@lemmy.world 2 points 3 months ago

En tant que père qui prend en charge les formalités liées aux gardes d'enfants, et les contraintes de les déposer, les reprendre, préparer les repas... Je ressens très bien cette deuxième journée qui fait obstacle aux pressions professionnelles. Je suis également scandalisé que lorsqu'on a une différence de salaire au sein du couple (liées aux années d'expérience et d'étude, pas forcément au genre), le système d'aides sociales incite à ce que ce soit la personne la moins rémunérée qui prenne des congés parentaux. Il faut accepter un réel sacrifice financier pour le ménage pour permettre à l'autre conjoint (souvent l'homme) de prendre toute sa place dans l'éducation des enfants.

Il ne s'agit pas seulement de mieux partager les tâches au sein du couple : il s'agit surtout que la société française évolue pour accorder une vraie place à la parentalité, quel qu'en soit le genre. On favorise les hommes et les femmes qui font passer leur carrière avant le reste. Les règles actuelles d'égalité au travail sont au détriment de celles qui tiennent à conserver un rôle parental légitime, et de ceux qui tiennent à l'assumer aux aussi.

[–] JulienFalgas@lemmy.world 9 points 4 months ago

Quand je repense aux assauts en règle contre les vilains "pirates" qui partageaient des fichiers musicaux en P2P dans les années 2000, à la création d'une agence adhoc (Hadopi) pour identifier et réprimander ces dangereux individus coupables de mettre en danger les ârtistes... Tout cela pour ne surtout pas considérer sérieusement l'hypothèse d'une licence globale, avec comme dommage collatéral de discréditer des techniques informatiques tournées vers le partage et la coopération.

Aujourd'hui, on n'en a plus grand chose à faire des artistes. Tant que le public verse son obole mensuelle aux plateformes de streaming, tout va bien. Et puis si "les gens" se contentent du vomi régurgité par les grands modèles, c'est pas plus mal. L'espèce humaine n'a sans doute aucun besoin de communiquer autour d'expressions humaines et sincères. Du moment qu'on engraisse les patrons des Bigtech et leurs vassaux, tout va bien.

Après tout, c'est pas comme si l'habitabilité de notre environnement était sur le point de s'effondrer et qu'on devait trouver des idées neuves et faire émerger des actions concertées pour y remédier.

[–] JulienFalgas@lemmy.world 2 points 6 months ago

Apparemment, elle risquait de faire trop "baba cool / punk" compte tenu de la gravité du sujet.

 

publication croisée depuis : https://lemmy.world/post/24495255

L'article est paru sur The Conversation France, mais je préfère l'accompagner d'une autre image que celle des deux affreux : un extrait de la BD de science-fiction Mediaentity, par Simon & Emilie (CC by-nc-sa)

 

L'article est paru sur The Conversation France, mais je préfère l'accompagner d'une autre image que celle des deux affreux : un extrait de la BD de science-fiction Mediaentity, par Simon & Emilie (CC by-nc-sa)

[–] JulienFalgas@lemmy.world 8 points 6 months ago

Sans le modèle publicitaire, il n'y aurait pas eu un tel intérêt économique à déployer les interfaces toxiques des grandes plateformes du numérique.

Problème aujourd'hui : Musk a montré que la rentabilité publicitaire directe n'était pas la seule voie. Twitter n'a jamais été rentable, surtout depuis son rachat... Mais Musk en a fait un instrument pour démultiplier sa mise. Alors qu'il a donné comme personne avant lui dans une campagne américaine, alors qu'il a racheté Twitter à perte, il sort gagnant de l'opération.

Ceci étant, taxer la publicité serait déjà un moyen simple et rapide d'établir une situation concurrentielle plus loyale pour de nouveaux entrants désireux d'explorer d'autres possibles.

[–] JulienFalgas@lemmy.world 2 points 6 months ago* (last edited 6 months ago)

Jusque là, il fallait s'inquiéter de la puissance exponentielle de quelques grandes firmes du numérique, acquise grâce à leur réussit économique sur le marché de la publicité.

Désormais éclate au grand jour l'influence des géants du numérique sur notre espace public. Là où les milliardaires français s'offrent des journaux, les américains s'offrent des médias sociaux numériques.

Face à cela, la réponse ne peut pas venir du capitalisme, elle ne peut pas venir de startup européennes qui seraient gouvernées par l'argent. Les invités reconnaissent l'importance d'une régulation, mais insistent sur la nécessité de penser en termes de "communs" soutenus par les services publics.

[–] JulienFalgas@lemmy.world 4 points 6 months ago

Si vous ne possédez pas le réseau social, c'est lui qui vous possède.

Pendant que les multi-milliardaires américains du numérique assument sans complexe leur soutien aux projets politiques les plus réactionnaires. Pendant que d'aucun‧e‧s recommandent doctement de créer un "Airbus" du numérique. ( /sarcasme Car c'est bien connu les avions Airbus émettent moins de GES que les Boing, donc nos géants du numérique seront moins toxiques, c'est sûr.)

Le créateur de Mastodon, lui, entérine la session de son bébé à une organisation européenne à but non lucratif.

[–] JulienFalgas@lemmy.world 4 points 6 months ago (1 children)

Le fact-checking n'est pas un sujet à mes yeux. J'écrivais ce matin sur Mastodon :

Face à la surcharge informationnelle, les fact-checker eux-mêmes doutent de la pertinence de la tâche. On ne peut pas exercer son esprit critique face à un tel flot d'informations.

On ne peut pas vérifier chaque info affichée sur un flux de réseau social qui les décontextualise toutes et y mêle blagues, militantisme, approximations et interprétations personnelles.

Dans cet écosystème informationnel, expliquer le modèle des plateformes devient central pour l'éducation aux médias et à l'information.

Une fois compris que tout est fait pour capter notre attention, il me semble que le seul choix raisonnable serait d'en sortir et de faire autrement.

Je te rejoins complètement pour estimer que le fruit est pourri à la racine par son design toxique. Ce qui m'inquiète c'est que, lorsqu'on parle de quitter Facebook ou X, on cherche tout de même des "alternatives à" qui leur ressemblent.

Je vois surtout passer des réactions outrées face à l'abandon du fact-checking. C'est bien dommage, car ce n'est pas le plus inquiétant dans les déclarations de Zuckerberg. Mais le fait que les grandes plateformes tombent le masque est peut être un bien. Peut-être va-t-on cesser de croire que les réguler et éduquer les "jeunes" suffira à s'en protéger ?

[–] JulienFalgas@lemmy.world 2 points 8 months ago

Une chose me gêne dans tous ces article sur l'exode de X : lorsqu'on parle de quitter X, c'est toujours avec l'idée implicite d'investir une autre plateforme de micro-blogging.

C'est l'éléphant au milieu de la pièce, le grand impensé : le Twitter d'avant Musk était déjà très critiquable depuis plusieurs années. C'est pourtant le modèle que reproduisent les alternatives sur lesquelles on s'enthousiasme de retrouver l'esprit du Twitter des débuts.

J'ai relu ce qu'écrivait Romain Badouard à propos de Twitter dès 2017 (Le désenchantement de l’internet. Rumeur, propagande et désinformation, FYP éditions) :

Les géants de la Silicon Valley ont acquis un pouvoir énorme a travers les technologies qu’ils développent, celui de produire de nouvelles normes sociales. Twitter par exemple a créé son propre format de discussion avec sa limite des 140 caractères, ses hashtags et ses arobases. Les contraintes d’utilisation ont engendré de nouvelles habitudes qui se sont peu à peu transformées en coutumes. Sur le réseau social, on cherche avant tout la petite phrase, on souhaite se faire valoir devant un public, on interpelle violemment des personnalités. La forme l'emporte définitivement sur le fond et les spécificités techniques de la plateforme ont fait naitre un environnement d’échange 2 la fois simpliste, conflictuel et moralisateur^1^.

Le pouvoir des géants du web tient ainsi 2 la manière dont ils peuvent influencer et contraindre les comportements de mil- lions, voire de milliards d’individus. A cette domination technologique s’ajoute une position oligopolistique sur le marché

^1^. Au-delà de la simplification et de la radicalisation des propos engendrées par la limite des 140 caractères, les twittos seraient plus à même de produire de messages s'apparentant à des maximes d'un haut niveau de généralité pour parler de l'actualité. Sur la manière dont Twitter a créé un nouveau style d'échange à travers ses contraintes techniques, voir Arnaud Mercier, op. cit., etJulien Longhi, « Essai de caractérisation du tweet politique», L'information grammaticale, n° 136, 2013, p. 25-32.

[–] JulienFalgas@lemmy.world 1 points 8 months ago

La nuance est bienvenue et j'abonde dans ton sens. Face à des États qui sont gangrénés par les intérêts privés, l'intérêt public et collectif dépend de plus en plus des organisations non gouvernementales ou des coopératives. Malheureusement, ces rustines-là (qui ont notamment amorti la crise sanitaire) on ne les soutient guère et on les pousse à rentrer dans le moule : financements par appels à projets, marchés publics taillés pour les plus grosses structures...

Cf. dans La Revue Dessinée n°42 (novembre 2023), l'enquête sur le groupe SOS :

Ne dites plus «associations» mais «entrepreneurs sociaux». Des foyers d’hébergement aux Ehpad, de plus en plus d’acteurs de la solidarité s’inspirent ouvertement du secteur marchand. «Efficience», «lucrativité», «gestion des collaborateurs» ne sont plus des gros mots pour les adeptes du «social business». En France, le Groupe SOS et son influent fondateur, Jean-Marc Borello, incarnent à eux seuls cette révolution. À la tête de 750 établissements, ce petit poisson devenu trop grand dévore tout sur son passage, dans une quête effrénée de rentabilité. Au risque de malmener ses salariés et ses usagers.

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