Poésie

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Rita (jlai.lu)
submitted 2 days ago* (last edited 2 days ago) by ortaviz@jlai.lu to c/poesie@jlai.lu
 
 

Empilé sur les voisins
j'ai plein de superstitions,
serrure trois points

Heureux les poumons
gonflés, remplis,
jusqu'au bas ventre

Le monde est couvert
de bac acier
Pour me déporter
d'entre les murs
je ferais n'importe quoi

même prier
25 fois
Rita de l'impossible.

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aux portes des filles elle ne sait pas
  quoi faire
peut-il être trop tard
  pour aimer
  qui
  elle aime
peut-elle juste partir alors qu'elle aime encore
celui qui l'aime aussi
aussi mal le fasse-t-il
aussi mal lui fasse-t-il en n'étant que
celui
  peut-elle s'être trompée
  autant
  et ne jamais avoir
  menti

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submitted 1 week ago* (last edited 1 week ago) by truite@jlai.lu to c/poesie@jlai.lu
 
 

Je célèbre l’armoise,
le chêne de broussailles, le pin gris, le genièvre,
les méprisés, les réprouvés,
acceptés de mauvais gré
car rien d’autre ne pousse ici.

Ils sont ceux qui ne lâchent rien,
ils n’ornent pas nos jardins,
ne seront ni meubles ni repas,
combustibles avec parcimonie
car rien d’autre ne pousse ici.

À eux l’austère hardiesse
de pousser sur la serpentine et le gravier,
nulle eau que celle qu’on vole
à celui d’à côté si bien
que rien d’autre ne pousse ici.

Je célèbre la tige noueuse et cassante,
l’âcre feuillage gris-vert et l’aiguille écailleuse
le cône empesé, la baie amère, le bourgeon minuscule,
et l’odeur grandiose et rance de l’urine de chat
puisque que rien d’autre ne pousse ici.

Citoyens d’une terre rude, toxique même,
asociaux, indociles et opiniâtres ;
ils ne partagent pas mais habillent malgré tout
de vie un sol nu et pauvre,
en poussant où rien d’autre ne pousse, ici.

Ursula K. Le Guin dans Derniers poèmes ("En fin de journée (2010-2014)"), traduit par Aurélie Thiria-Meulemans

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Compresses (jlai.lu)
submitted 2 weeks ago* (last edited 2 weeks ago) by ortaviz@jlai.lu to c/poesie@jlai.lu
 
 

Parler de soi
est l'occupation,
dans l'économie de
la réputation
où les tons des palettes
superposent en compresses
Des litres de grumeaux
sous des tonnes de tendresse

Souvent je me demande
que faut-il faire
pour retrouver au corps
le goût profond
tenace
des souvenirs,
arrière-goût
qui ne s'efface,
baiser soyeux gravé dans la mousse de

mes entrailles.

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submitted 2 weeks ago* (last edited 2 weeks ago) by truite@jlai.lu to c/poesie@jlai.lu
 
 

ici tout s’effondre la vie déserte dit-on
c’est faux c’est seulement
le vide humain
les toits qui s’ouvrent aux pluies les planchers aux herbes
tout sauf un désert
seul grain de sable:
la grappe de vieux touristes qui s’entrappellent les jeunes
et tu souris
demain
ils seront chair à asticots compost cendres
les jeunes
toi qui es vieille depuis l’enfance
tu le seras aussi
et chez toi qui n’est plus chez toi
qui est chez eux
vermoulura de même

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Qui
nous remerciera
nous
peuple de parias
d'avoir tu nos peines
et dans un coffre d'aéroport
plié nos langues exubérantes
l'adresse d'un cimetière
pour le voyage du retour

Qui

_

Souad Labbize, dans Je franchis les barbelés

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submitted 1 month ago* (last edited 1 month ago) by truite@jlai.lu to c/poesie@jlai.lu
 
 

le texte aborde les violences conjugales de manière claire mais sans descriptions détaillées ni voyeurisme

Pour certains c'est la colombe blanche
La liberté
Pour moi c'est Rouge Pute
Ma liberté
Du rouge à lèvre, du rouge voyant, du rouge-tu-me-vois ?
Du rouge-c'est-moi

Putain cognait-il si je mettais du rouge
Elle déclenche la violence la féminité
Les insultes l'interrogatoire les brutalités
Rouge sang

Dans ma nouvelle collection je choisis un tube
Rouge Pute
Je dessine mes lèvres, dessine ma vie
Visible
Vivante
Rouge vif

Perrine Le Querrec, dans Rouge Pute

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Nous sommes les toutes petites rétines
à trames
sur lesquelles dessinent à peine
laché⋅es dans les rues
pour récolter
expédition
dans le carnet
– Sushi Tacos –
La rue c'est celle qui porte.
Où les pensées accrochent
minuscules cadences,
qu'on déplace,
et qu'on inscrit
– Easy Vape, Maxi Bazar –
des mots
par huitaines
saisir l'essence commando
à découvert
les méthodes incertaines,
deux pieds sur le clos Terre.

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bonne (jlai.lu)
submitted 1 month ago by truite@jlai.lu to c/poesie@jlai.lu
 
 

l'avenir à 15 ans s'écrit loin des lycées
parce qu'on est bonne à rien parce qu'on est bonne
qu'à ça
avec nos jupes trop courtes nos bottes trop hautes
nos résilles trop trouées nos cils trop longs
un tas de trucs en trop
un tas de trucs en trop qui se battent dans la tête pendant qu'on ne fait rien
qu'attendre que ça passe
un tas de truc en creux qu'on cache entre les os quand il ne reste que ça
mais que ça c'est à nous
on attend que ça passe
parce que tout passe
les lèvres bleues
les yeux cernés de noir pensées cernées de psy qui ne voient que les os
et pas ce qu'il y a entre
parce que ça c'est à nous

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submitted 1 month ago* (last edited 1 month ago) by truite@jlai.lu to c/poesie@jlai.lu
 
 

On n'a pas su pour le langage
on n'a pas su.

Les phrases nous coupent
la langue
parler nous brûle
sur les lèvres.
On n'a pas su admettre
que c'est lui qui nous tient

nous longe le corps
nous roule
nous pénètre.
On n'a pas su
en accueillir la chair
et le laisse un peu
en faire la peau:
du cœur.

Extrait de "Mon corps est un texte impossible".

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Entre (jlai.lu)
submitted 1 month ago by ortaviz@jlai.lu to c/poesie@jlai.lu
 
 

C'est être debout entre deux portes.

arrière couloir tamisé
le costume noir chemise blanche
pas gris, ni beige, ni bleu foncé
Noir textile est la couleur du service serviteur
des contrats de travail un jour ou deux renouvelés

Au fond d'un couloir vide
j'ai déplacé une chaise
et attendu entre deux horaires,
dans la lumière interstice
ma chemise blanche aux boutons nacrés
que quelque chose perce en silence.

Nouvelle place, nouveaux vêtements
si tu fais ça chez toi
une chaise entre deux portes
Le monde n'a jamais été regardé de cette manière.

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Nique le néant (infosec.pub)
submitted 1 month ago* (last edited 1 month ago) by RelativityRanger@jlai.lu to c/poesie@jlai.lu
 
 

Dans les ruelles aux pavés rouges,
Où la sueur bâtit les matins,
Un cri s’élève, fort et farouche:
« À nous le pain, à nous demain ! »

Pas de trône au sommet des rêves,
Pas de prisons sous les drapeaux,
Juste des mains qui se relèvent,
Pour bâtir loin du vieux fardeau.

Et s’ils veulent qu’on reste dociles, seuls,
Farcis d’angoisses sous oppression,
Qu'ils sachent que même dans le linceul,
Nique le néant, persiste la subversion.

Quand l’avenir se fait poison,
Que chaque heure meurt sans témoin,
Partout résonnent les cris de rébellion,
L’insurrection y bat sans fin.

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Sans titre (jlai.lu)
submitted 1 month ago* (last edited 1 month ago) by ortaviz@jlai.lu to c/poesie@jlai.lu
 
 

Les souvenirs ont la couleur de nos yeux,
l’épaisseur des carreaux
Dans la forêt à 5 du mat’
des glapissements, des pleurs
(Nom) veut des résultats,
offre d’emploi raisonnable
entrepreneur de soi entrepreneur de soi
tu as cinq minutes pour convaincre,
sans pleurs.

La forêt est le contraire de la ville
Dans l’immeuble jaune, on fabriquait des abat-jours avec les sachets en papier kraft des commissions,
on disait la pauvreté est un jeu d’ingéniosité
la nuit on partait visiter des maisons vides.

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submitted 1 month ago* (last edited 1 month ago) by truite@jlai.lu to c/poesie@jlai.lu
 
 

t'es dégueulasse t'es stupide tu sers à rien tous les matins t'as pas envie de te réveiller
mais tout ce qui compte c'est de savoir si t'entends des voix
t'entends le vent t'entends les chats t'entends même l'électricité qui court dans les murs dans tes mains
t'entends les appareils chanter t'entends les voitures dans la rue t'entends les voisins qui s'engueulent
t'entends la musique qu'existe pas
t'entends ton cœur t'entends tes os qui grincent avec le brouillard tombé sur la loire
mais tout ce qui compte c'est de savoir si t'entends des putain de voix
t'entends pas tes propres pensées y a pas de son y a des couleurs
y a pas de voix
sur ta peau des coulées de boue
sous tes yeux des ombres mouvantes qui ouvrent des gueules immenses
des chats qui se déforment des chats morts qui reviennent
dans ton nez des spectres d'odeurs
dans tes veines du goudron et tu cherches le sang vrai
et toujours pas de voix
tu flottes au-dessus du corps et il agit sans toi
t'es dans la toile des bruits du monde
qui t'éparpillent
tu t'y morcelles et le corps tout en bas
continue
t'es pas loin mais la porte est fermée
mais est-ce que tu entends des voix
DES VOIX DES VOIX
EST-CE QUE VOUS ENTENDEZ DES VOIX???
~peut-on hurler si fort que les psy gardent nos voix en acouphènes~

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